L’honorable Jim Munson : Ma question s’adresse au leader du gouvernement au Sénat. Honorables sénateurs, à quelques pas d’ici, un monument massif sera construit sur les terrains de la Cour suprême et de Bibliothèque et Archives Canada; la construction du monument commémoratif national pour les victimes du communisme commencera au cours des prochains mois sur le terrain vacant situé entre les deux institutions. Nous en avons beaucoup entendu parler, monsieur le leader. Personne ne s’oppose à la construction du monument, mais les Canadiens, et surtout les gens d’Ottawa, sont préoccupés par son emplacement bien à la vue et par sa taille imposante. En effet, le monument occupera 5 000 mètres carrés et sera composé d’une série de plis en béton de 14 mètres de haut, juste en face d’un pont de l’espoir, qui sera tout aussi grand. Chose incroyable, ces dimensions ont été réduites par rapport à la proposition originale.
Depuis longtemps, ce terrain était conçu pour accueillir le nouvel édifice de la Cour fédérale, permettant ainsi de compléter la triade judiciaire autour de la Cour suprême. Cependant, en mai 2012, ce projet a été discrètement écarté en faveur de la construction du monument.
Le ministère des Travaux publics avait estimé que le terrain en coûterait environ 1 million de dollars, mais maintenant, l’architecte d’Ottawa Barry Padolsky a indiqué dans une lettre ouverte au premier ministre Harper que, selon ses entretiens avec des experts en immobilier, la valeur estimative serait de l’ordre de 16 à 30 millions de dollars.
Monsieur le leader, étant donné la controverse entourant ce projet de construction sur un terrain de premier plan et de grande valeur le long du boulevard de la Confédération, le gouvernement reviendra- t-il sur sa décision et examinera-t-il d’autres emplacements pour ce monument?
[Français]
L’honorable Claude Carignan (leader du gouvernement) : Sénateur, comme vous le savez, il s’agit d’un monument qui honorera plus de 100 millions de vies qui sont disparues sous les régimes communistes et qui servira à rendre hommage aux idéaux canadiens que constituent la liberté, la démocratie et les droits de la personne. Au Canada, plus de 8 millions de personnes sont originaires de pays qui ont souffert sous des régimes communistes. Notre gouvernement s’est engagé à honorer les victimes du communisme dans son discours du Trône de 2010, et nous nous réjouissons à l’idée de donner suite à cet engagement.
[Traduction]
Le sénateur Munson : Personne, et je dis bien personne, ne s’oppose à la construction d’un monument commémoratif en l’honneur de ces millions de victimes partout dans le monde. Cependant, d’après votre réponse, j’ai l’impression que vous n’avez pas changé d’avis, ou que le gouvernement n’a pas changé d’avis, quant à l’emplacement de ce monument, même si beaucoup de gens préféraient qu’il soit construit ailleurs. Shirley Blumberg, une éminente architecte de Toronto faisant partie du jury qui a examiné les plans proposés pour le monument, a révélé en décembre qu’elle avait beaucoup de mal à accepter que le monument soit érigé sur un site aussi bien en vue, qui a presque une valeur symbolique sacrée, et elle a remis en question la faisabilité de ce projet, de même que son coût estimatif. Le maire de la ville, Jim Watson, quant à lui, croit que le monument ferait ombrage à l’enceinte de la Cour suprême et qu’il serait une plaie dans le paysage. Puis, il y a la juge en chef Beverley McLachlin, qui pense que le monument choisi « pourrait envoyer un mauvais message dans la Cité judiciaire, communiquant involontairement un caractère morne et brutal qui n’est pas en lien avec un espace dédié à l’administration de la justice ».
Monsieur le leader, étant donné que votre gouvernement paie la plus grande partie des coûts estimés de 5,5 millions de dollars du projet, quelles mesures prendrez-vous pour répondre aux préoccupations légitimes que ces personnalités ont soulevées à l’égard de ce monument commémoratif controversé?
[Français]
Le sénateur Carignan : Sénateur, je crois que l’érection d’un monument qui rend hommage à plus de 100 millions de personnes qui ont perdu la vie sous le régime communiste et qui, en outre, rend hommage aux idéaux canadiens que constituent la liberté, la démocratie et les droits de la personne, m’apparaît fort appropriée.
[Traduction]
Le sénateur Munson : Parlant des victimes et de la réalité quotidienne, monsieur le Président et monsieur le leader, oui, bien sûr, nous comprenons que ce monument vise à honorer les victimes du communisme, mais, aujourd’hui, dans la Chine communiste, il y a beaucoup de victimes du communisme. En fait, on pourrait dire qu’il y a eu des millions de victimes à une certaine époque. Aujourd’hui, des centaines, sinon des milliers, de personnes sont incarcérées. Comme vous l’avez dit, des défenseurs des droits de la personne sont incarcérés en raison de leurs convictions et de leurs valeurs, par exemple la liberté d’expression, y compris le lauréat du prix Nobel de la paix, M. Liu Xiaobo.
Outre construire ces monuments controversés, quelles mesures votre gouvernement a-t-il prises récemment pour aider les victimes contemporaines du communisme? Qu’est-ce que le gouvernement a fait pour les personnes comme M. Liu?
[Français]
Le sénateur Carignan : Sénateur, comme vous le savez, tous les gestes que nous posons, particulièrement à l’échelle internationale, le sont dans le but de promouvoir les idéaux canadiens. Vous pouvez citer en exemple les positions fortes que notre gouvernement a prises sur la scène internationale, que ce soit en Ukraine ou dans le cadre de la mission contre le groupe terroriste de l’État islamique en Irak et en Syrie.
[Traduction]
Le sénateur Munson : Très brièvement. Sauf votre respect, ce n’est pas la réponse que les Canadiens voudraient entendre. J’ai posé une question précise. Un lauréat du prix Nobel de la paix est en prison en Chine communiste et nous aimerions savoir si ce gouvernement parle ouvertement des droits de la personne avec les autorités chinoises. Cet homme est toujours en prison.
Monsieur le leader, qu’en est-il du couple de chrétiens canadiens qui exploitait un café en Chine, près de la frontière avec la Corée du Nord? Ils ont été arrêtés en août dernier. Il s’agit de citoyens canadiens. Kevin et Julia Dawn Garratt ont été accusés d’espionnage. Ils se trouvent dans un pays communiste. Sont-ils victimes du communisme? Mme Garratt a été libérée, mais son mari est toujours derrière les barreaux.
Étant donné qu’il accorde une si grande importance à ce monument qui sera érigé quelque part à Ottawa, le gouvernement conservateur exerce-t-il des pressions pour que M. Garratt soit libéré? Que fait le gouvernement pour aider cette victime du communisme?
[Français]
Le sénateur Carignan : En ce qui concerne le dossier de Kevin et Julia Garratt, nous saluons évidemment la récente décision de libérer Mme Garratt sous caution, mais nous demeurons très préoccupés par la détention de M. Garratt. Nous avons porté ce dossier devant les plus hautes instances et nous allons poursuivre nos discussions avec les représentants chinois. Les membres du corps consulaire parlent régulièrement aux Garratt, et nous tentons de rester en communication avec eux afin de leur offrir un soutien consulaire.
En ce qui a trait au dossier de Martin Lee, qui est chef du Mouvement démocratique de Hong Kong, comme le sait le sénateur, les comités sont des entités indépendantes à l’autre endroit; ils décident de leur propre calendrier et sont libres d’inviter les témoins qu’ils veulent. Quant aux manifestations en faveur de la démocratie, le Canada continue d’appuyer la règle de droit et les aspirations démocratiques du peuple de Hong Kong.
Nous avons récemment exprimé nos préoccupations auprès des autorités chinoises au sujet du traitement des dissidents politiques, et notre gouvernement suivra toujours une approche fondée sur des principes en matière de politique étrangère qui favorisent la promotion des valeurs canadiennes partout dans le monde. C’est d’ailleurs l’objet de ce monument dont vous parlez.